Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Les miscellanées du Docteur B
5 mars 2009

Langue sauce gribicki

On est toujours ennuyé avec les noms en ski : Dostoïevski, Trotski, Khrouchtchev… Faut il un i ou un y ? Avec Khrouchtchev, aucun problème. Mais avec les autres ? S'ils sont russes, il ne faut jamais d' y, s'ils sont polonais, on ne sait pas. De plus, en polonais, ils prennent le féminin. M. Leczynski, Mme Leczynska ; mais non en russe : on dit M. Dostoïevski, on ne dit pas Mme Dostoïevska; ce sont des petites choses qui peuvent aider. Une fois qu'on les sait il serait exagéré de dire qu'on connaît le russe ou le polonais, qu'on y est assis ; ce serait trop dire ; on est seulement dans la bonne direction, on a le derrière entre les bras du fauteuil.

Engageons-le plus étroitement. On trouve souvent dans les langues slaves des groupes de lettres difficiles à prononcer : Prz, Brrgrtvz, etc. Je lisais, quand j'étais enfant, Les deux nigauds de La comtesse de Ségur ; il y avait là un Polonais qui s'appelait, Dieu me pardonne, Cozrgrbrlevski, et l'homme se sent peu de chose quand il doit prononcer un tel nom d'un seul coup. Ce sont des sons que le porc arrive à imiter, s'il a de la chance, quand il grommelle sur sa pâtée, parce que ses oreilles l'embarrassent (élevez du porc anglo-normand, le porc français a l'oreille trop longue, elle lui cache sa pâtée, et il ne profite pas bien) mais l'homme moyen qui n'a pas le nez bouché ? (pour le déboucher, mâchez du miel, un conseil est toujours utile). Ne vous perdez pas dans les détails, prononcez ch, ou tch, vous aurez des chances de tomber juste beaucoup plus souvent que vous ne pensez ; c'est une règle que je me suis faite, je ne m'en suis jamais trouvé mal, on est bien obligé de ses donner des lois. Et, d'ailleurs, que feriez-vous d'autre ? Quand une clarinette est bouchée, Chopin lui-même (et pourtant quel pianiste ! son nom l'indique assez), n'en tirerait aucun son.      

Ou alors tournez la difficulté, employez d'habiles équivalents: au lieu de dire: « après la chute de Przemysl », dites: « après la victoire de Valmy », ce sera toujours un nom de bataille , la couleur locale sera sauvée.

C'est beau non?

Mais c'est pas de moi.

C’est ainsi que non seulement Allah est grand, comme il aurait dit, mais également que Vialatte écrivait dans La Montagne, journal presque autant Clermontois que Montferrandais.

Ceux qui ne connaissent pas Vialatte seront dans un premier temps fouettés avec des orties brûlantes (Urtica urens) et leurs plaies seront enduites de sel (de préférence de la fleur de sel de Noirmoutier, certes un peu plus cher, mais tellement meilleure), puis devront courir nus acheter les recueils de ses chroniques, disponibles dans toute épiceries digne de ce nom.

animals_Dusseldorf

Chroniques des choses grandes et magnifiques, par Alexandre Vialatte,

440 pages, Ed. Hors Collection (5 juin 2003) - Bibliothèque de l'humour

Publicité
Publicité
Commentaires
T
... les chroniques de la Montage existent, je crois, en deux tomes avec des dessins de Sempé. Il ne manquerait plus qu'un CD de Brassens jeté dedans, et le bonheur serait total.
Archives
Publicité
Publicité